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L'Âge d'or de l'Islam : 750 - 1055

1. ÉLABORATION DE LA RELIGION ET COURANTS DE PENSÉE ( dossier "les vraies questions")

Ce chapitre a pour but de montrer la richesse du débat d'idées à cette époque des lumières.... et de se poser les vraies questions concernant l'Islam actuel.

En cette période tendue où des groupes fanatiques se revendiquent ostensiblement de l'Islam pour commettre leurs attentats et imposer leur diktat aux populations qu'ils asservissent, on assiste en France à de nombreux débats sur les thèmes suivants : L'Islam est-il compatible avec la République ? L'Islam et la Démocratie sont-ils conciliables ? Ou encore, Islam et laïcité peuvent-ils co-habiter ?

Ainsi posées, ces questions sont de nature à semer la confusion car elles amènent à penser que cette religion forme un tout indivisible vis-à-vis duquel il n'y a que deux positions possibles : pour ou contre. Ce qui divise.

Toute autre serait notre état d'esprit si on les formulait ainsi : « Le courant théologique dominant dans lequel s'est engagé l'Islam depuis le onzième siècle est-il compatible avec les valeurs de la République (démocratie et laïcité entre autres) ? » Ou encore : « Le courant théologique actuel de l'Islam est-il conciliable avec la pensée philosophique ? » Non seulement celle des cultures non musulmanes, mais aussi celle d'Al-Razi, Al-Kindi, Al-Farabi, Avicenne ou Averroès ?

[…]

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Sommaire du chapitre

Élaboration de la religion et courants de pensée durant l'âge d'or de l'Islam

Construction de l'Islam
Élaboration du Coran officiel
Les écoles de jurisprudence
Les Hadiths (Tradition du prophète) et la Sunna
La Charia (« Loi divine »)
Les gens du livre

L'histoire de la pensée musulmane jusqu'à la fin de « l'âge d'or »

Le Coran « créé » ou « incréé » ?
Fin de l'âge d'or

2. GRANDS HOMMES ET RAYONNEMENT CULTUREL

Bibliographie : Dictionnaire de civilisation musulmane (Larousse). Travail préparé pour un PAE sur l'Islam au collège Massenet (Marseille)

L'AGE D'OR INTELLECTUEL MUSULMAN

Après la constitution d'un vaste empire musulman et la fulgurante expansion de l'Islam de l'Inde jusqu'à l'Espagne durant les cent ans de la dynastie Omeyyade (661-750), fleurit pendant le règne des califes Abbassides la période musulmane classique considérée comme l'âge d'or de cette civilisation.

Elle dure pendant trois siècles de 750 à 1055 et correspond à la naissance, à la vie et au déclin de la "falsafa", la philosophie de la raison grecque adaptée à la pensée musulmane par le médecin Al-Razi (m. 932), par Al-Farabi (m. 950) et surtout par l'iranien Avicenne (m. 1037). Ce dernier soutient que l'esprit humain appartient au monde du pur "intelligible", c'est-à-dire qu'il est partie intégrante de la conscience divine.

En Andalousie, Averroès (m. 1198) reprend cette idée et déclare que l'intellect humain est une émanation de l'intelligence divine et que révélation et philosophie sont également inaltérables et porteuses de vérité. Il incombe aux philosophes de dégager la « vérité intérieure » de la révélation divine.

À Bagdad, Avicenne est la cible du philosophe Al-Ghazali (m.1111). Ce dernier déclare qu'il est impossible d'atteindre la vérité par la certitude intellectuelle de la philosophie. Il publie en 1095 un ouvrage qui s'intitule « L'incohérence des philosophes » (Tahafut al-Falasifa) dans lequel il montre qu'ils n'aboutissent qu'à des erreurs, condamnables car contredisant la Révélation. Il joue un rôle déterminant dans l'éradication de la philosophie gréco-musulmane rationnelle.

À Cordoue, l’œuvre d'Averroès est brûlée sur la place publique et il doit fuir l'Espagne. Plus rien ne s'oppose plus à l'épanouissement de la théologie dogmatique qui devient dès lors dominante dans le monde musulman. La prédominance de l'esprit est remplacée par celle de la conscience qui donne au croyant le « libre arbitre » d'obéir ou non aux commandements et le rend responsable du châtiment ou de la récompense futurs.

Cette théologie qui prône le retour à la religion des anciens (salafisme), au Coran "incréé" (manifestation divine qui doit s'appliquer à la lettre) est largement diffusée à partir du XIème siècle par les madrassas, devenues des collèges universitaires de droit musulman et de théologie, fer de lance de l'orthodoxie sunnite. Elle impose la Charia, censée répondre à tous les problèmes des croyants, comme source unique du droit.

CAUSES DE CE RAYONNEMENT

1) Les gens du livre (Ahl el-kitab) ou Dhimmis ("protégés")

La Charia confère aux fidèles des religions monothéistes révélées que l'Islam est venu "sceller", Judaïsme et Christianisme, un statut juridico-religieux protégé. Le zoroastrisme iranien sera également inclus dans ce statut après la conquête de la Perse. Moyennant l'acceptation de la domination musulmane, leur droits sont reconnus et des garanties leur sont accordés. En particulier, ils ne peuvent être convertis de force et ne participent pas aux guerres. Ils ont théoriquement le droit de pratiquer leur religion et de conserver leur système juridique.

Au cours de l'histoire, de nombreux juifs ou chrétiens accèdent à de hautes fonctions et rendent des services signalés à la civilisation musulmane. C'est ainsi que, accueillis à la cour abbasside vers l'an 800, les chrétiens nestoriens jouent un rôle déterminant comme transmetteurs et traducteurs en arabe des grandes œuvres scientifiques et philosophiques grecques. Par ailleurs, des "dynasties" de savants nestoriens figurent parmi les grands médecins des califes abbassides. Du coté des juifs, les savants, érudits, poètes et philosophes écrivent en langue arabe et animent la vie intellectuelle de cette époque. Le persan devient la langue des Belles Lettres.

Cette protection de la Charia n'empêche pas quelques persécutions de la part de jaloux ou de fanatiques. A la longue, ces privilèges mécontentent fortement les populations musulmanes. Les mozarabes (chrétiens arabisés) et les juifs d'Andalousie se voient expulsés à partir du 12ème siècle. Ce statut tombe en désuétude avec les réformes ottomanes. Il est officiellement abrogé en 1923.

2) Les traductions

"Cherchez la Connaissance jusqu'en Chine s'il le faut" avait dit Mahomet. Les arabes ont joué un rôle fondamental dans la transmission des trésors des sciences anciennes de l'Occident et de l'Orient.

Un profond désir de savoir et une forte curiosité intellectuelle animent ces périodes du début de l'Islam et lui confère son immense rayonnement. Déjà amorcées sous les Omeyyades, les traductions sont pleinement stimulées par les califes abbassides et notamment Haroun al-Rachid et son successeur AL-Mamoun.

Ce dernier va développer à Bagdad la "Maison de la sagesse" (Bayt el Hikma) où travaillent des savants de toutes confessions. De grandes familles de mécènes rivalisent avec les souverains pour encourager ces traductions.

Une école de traducteurs dirigée par des chrétiens tels que Hunayn Ibn Ishaq (célèbre médecin) et Thabit Ibn Qurra (mathématicien) va transcrire - du grec en syriaque puis en arabe - une part importante de l'héritage hellénistique, perse et même sanskrit.

L'usage du papier et la multiplication des copies vont faciliter cette transmission du savoir.

La langue arabe devient la langue noble des savants et de l'élite cultivée.

3) Les Bibliothèques

Phénomène unique dans l'histoire des cultures, les bibliothèques publiques et privées se multiplient. Ces réalisations, financées par le mécénat, répondent à des préoccupations aussi bien religieuses que scientifiques. Ce phénomène est général à tout l'Islam et s'étend de l'Andalousie à L'Inde, de Tombouctou à Samarcande.

Un réseau de "Maisons de la Science" (Dar el-Ilm), bibliothèques publiques financées par l'état se crée et reçoivent des boursiers. Celles de la Madrassa "El Mustansitiya" à Bagdag, de la "Maison de la science" du Caire, de Chiraz, de Téhéran, Samarcande, Hérat, Tabriz, Sanaa, Istanbul, Lahore, Dehlià contiennent des dizaines de milliers de volumes. La bibliothèque de Cordoue est réputée pour ses 400.000 volumes ! Même la stérilisante réaction fondamentaliste sunnite n'arrive pas à enrayer cet élan.

4) L'enseignement

Il repose sur une rigoureuse classification des savoirs dans une vision encyclopédique. Il manifeste également le désir d'atteindre la "Scientia" moins pour dominer l'univers matériel que pour montrer sa subordination à la "Sapientia", la sagesse divine, épicentre de la civilisation islamique et synthèse des grands savoirs universels.

Al-Farabi (10ème siècle) dans son "Énumération des Sciences" englobe pratiquement tous les champs du savoir de la science du langage aux sciences sociales en passant par la poésie, la logique, la physique et la métaphysique.

Ibn Khaldoun (maghrébin du 14ème siècle, considéré comme le plus grand historien pré-moderne musulman), classe ainsi les sciences : en tête viennent les sciences religieuses (Révélation, droit, théologie, sciences du langage), les sciences transmises par leurs créateurs (mathématiques, astronomie, musique...) et les sciences saisissables par la raison (philosophie).

Les lieux de l'enseignement sont :

Les étudiants, souvent boursiers et logés, reçoivent une licence (Idjazah) quand leurs maîtres estiment qu'ils ont atteint un niveau suffisant.

5) Encyclopédisme

Il se propage sous l'action de Al-Kindi au 9ème siècle et au siècle suivant d'Al-Farabi, ainsi que par les travaux de la société secrète des "Frères de la Pureté" vers 950 à Bassora (Irak).

L'Intellectuel musulman est "généraliste" et son champ d'action touche souvent à plusieurs grands domaines du savoir. Son désir est d'embrasser toute la connaissance de l'univers et de célébrer l'unité fondamentale de l'homme, écho de celle de Dieu. Il cherche à opérer un parallélisme constant entre spiritualité et esprit scientifique.

Ainsi la société secrète des "Frères de la Pureté" (Ikhouan al-safa) constituée en Irak (Bassora) au 10ème siècle est le cadre de débats intellectuels majeurs et réunit dans une encyclopédie toutes les connaissances de l'époque. Cette démarche se manifeste dans tout l'âge d'or musulman. Avec Al-Kindi (9ème s.), médecin, philosophe et mathématicien, puis Al-Farabi (9ème-10ème s.) qui embrasse toutes les disciplines dont la philosophie, les mathématiques et la musique. Omar al-Khayyam (11ème-12ème s.) est à la fois poète astronome et mathématicien. Le père de l'algèbre, Al-Khwarizmi (9ème s.), est également géographe et astronome. Al-Birouni (9ème-10ème s.)est un esprit universel qui étudie aussi bien la philosophie et les mathématiques que l'astronomie, la minéralogie, l'optique ou les techniques. Son livre de l'Inde (Kitab al-Hind) est encore utilisé par les chercheurs dix siècles après sa rédaction. Un autre intellectuel universel, Avicenne (9ème-10ème s.) est aussi célèbre comme "prince des médecins" en Europe que comme philosophe en terre d'Islam. Al-Razi (9ème-10ème s.) est à la fois médecin et alchimiste renommé dont le "Livre des secrets" influencera profondément certains savants occidentaux comme Nicolas Flamel ou Paracelse. Averroès (12ème s.) dont l’œuvre philosophique a une influence considérable en Europe, est également un grand médecin et un juriste renommé.

Tous les champs du savoir sont ainsi abordés par les plus grands esprits de ce temps. Récapitulons les grands domaines de la connaissance à cette époque en terre d'Islam.

LES DOMAINES DU SAVOIR

La PHILOSOPHIE

Avicenne, Averroès, Al-Ghazali

La MEDECINE

Al-Tabari (9ème s.) traité médical, Al-Razi (10ème s.), le plus grand clinicien de l'Islam, Al-Majoussi (10ème s.), Al-Israili, célèbre oculiste, Avicenne, Averroés, Al-Zarawi (10ème, 11ème s.), le plus grand chirurgien arabe, Avenzoar (12ème s.), etc.

Les MATHÉMATIQUES et L'ASTRONOMIE

Al-Khwarizmi, Al-Kindi, Thabit Ibn Qurra (9ème s.) astronome et géomètre, Al-Birouni, Avicenne, Omar al-Khayyam, les "fils de Moussa", trois frères et savants mathématiciens célèbres, Al-Battani (9ème, 10ème s.) qui appliquent les mathématiques à l'astronomie, etc.

La LITTÉRATURE et la POÉSIE

Les SCIENCES NATURELLES

L'ARCHITECTURE

La MUSIQUE, prodigieuse floraison musicale : Al-Isfahani (10ème s.), monumental livre des chants en 21 volumes, Milles et une nuits, place centrale de Bagdad dans la musique…

L'HISTOIRE : Ibn Khaloun (14ème s.) par sa rigueur est le plus grand historien classique. Ouvrage majeur : ses Prolégomènes(Al Muquaddima)

La THEOLOGIE et le DROIT se développent à travers des personnages comme le Mufti : autorité religieuse qui peut émettre des fatwas (avis juridiques) ; le Marabout : « celui qui est attaché à Dieu » ; l'Imam : celui qui est devant ; les Oulémas : docteurs de la foi ; et chez les chiites, les Ayatollahs, les Imams et les Mujtahids, autorités juridiques religieuses.

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Texte © Stéphane Bigo – Photos © Véronique ou Stéphane Bigo

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